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Paroles de Soignants : Paul, Interne en Médecine Générale

Paul, c'est mon beau-frère. Il a exercé en tant que Sage-Femme pendant quelques années avant de changer de voie et de reprendre ses études de médecine. Il nous livre ici un témoignage avec sa casquette d'Interne en Médecine Générale

Salut Paul, j'espère que tu vas bien. Peux-tu nous dire ce qui t’a conduit à exercer le métier de Médecin Généraliste ?

Plusieurs choses :

  • Le côté scientifique de la médecine : j'ai toujours adoré la biologie et apprendre et comprendre le fonctionnement du corps humain est clairement une des choses qui m'a motivé à débuter ces études.
  • Le côté intellectuel du métier : on passe pas mal de temps à réfléchir sur le type de prise en charge d'un patient et ça me plait beaucoup. Même si on n'est pas dans des sciences pures et dures, le fait de devoir raisonner en permanence est une caractéristique des sciences.
  • Le contact humain : j'adore être au contact des gens et je dirai que je suis même un peu trop bavard. Ainsi, pouvoir discuter avec des personnes dans mon cadre professionnel est très important.
  • Le côté altruiste : se dire que son travail c'est de guérir les gens ou de les empêcher d'être malade par des actions préventives, c'est très gratifiant.
  • Le champs des possibilités de la profession : je suis médecin généraliste et ma carrière peut prendre de multiples directions. Je peux travailler en libéral, en hospitalier, faire des formations pour me spécialiser dans certains domaines. Je suis maître de mon projet professionnel, qui peut évoluer à n'importe quel moment de ma vie.
  • Le côté dynamique de la médecine : on apprend tout le temps, entre l'apprentissage par l'expérience, les formations pour acquérir de nouvelles compétences, les recommandations sur les pratiques qui évoluent en permanence ou encore les progrès de la médecine, on doit tout le temps se tenir informé.
  • L'adaptabilité : on doit s'adapter en permanence aux personnes, à la quantité de travail sur la journée et donc aucune de nos journées ne se ressemblent.
  • La clinique : j'adore interroger et chercher ce que les gens ont en creusant mon interrogatoire, je cherche des symptômes. Ensuite, j'émets une hypothèse sur un diagnostic et l'examen clinique me permet de confirmer ou d'infirmer mes pensées. Je trouve ça génial qu'en discutant avec les gens puis en les examinant, sans matériel sophistiqué la plupart du temps, on arrive à trouver leur problème.

À quels problèmes fais-tu face au quotidien ?

Le problème de la coordination des soins est ce qui m'agace le plus dans la profession. Lorsque nous sommes dépendants d'autres spécialistes pour soigner quelqu'un que ce soit pour un avis ou un geste et que ces derniers sont difficilement joignables ou accessibles, on peut être amené à perdre énormément de temps dans la prise en charge du patient. Le plus souvent on est obligé de relancer ces spécialistes et de ce fait, c'est chronophage. Ce manque d'efficacité est très agaçant.

En plus, lorsqu'on travaille en milieu hospitalier et qu'on est tributaire d'un avis ou d'un geste de spécialiste pour avancer, on peut être amené à garder le patient hospitalisé plusieurs jours sans avancer dans sa prise en charge. Au prix d'une journée d'hospitalisation actuellement, c'est extrêmement frustrant ; voire rageant.

Quels sont les principes éthiques qui guident ta pratique ?

J’essaye d'être une bonne personne et d'être empathique avec tout les patients. J'essaye de ne porter aucun jugement sur personne. J'essaye de me donner au maximum avec chaque patient pour ne rien avoir à me reprocher.

Comment vois-tu l'avenir dans la santé mentale ?

Je pense qu'on vit dans un monde de plus en plus anxiogène et de ce fait les gens développent de plus en plus de pathologies psychiatriques, notamment des troubles anxieux ou des dépressions.

A mon sens, les médecins généralistes vont avoir de plus en plus de consultations en lien avec ce genre de pathologie.

Le problème c'est que malheureusement, on ne forme pas assez de professionnels en santé mentale (psychiatres, infirmiers) et ça va être un problème encore plus important qu'il ne l'est déjà car les médecins généralistes ne sont pas suffisamment compétents pour gérer la totalité des troubles psychiatriques.

Alors, avec le fait que les délais de rdv chez les psychiatres vont s'allonger, les médecins vont se retrouver en difficulté pour prendre en charge certains patients et ce sont ces derniers qui vont en pâtir.

Est-ce que tu as une anecdote amusante à partager ou une expérience particulièrement gratifiante vécue récemment ?

Je me rappelle avoir vu un patient en visite lorsque j'étais en stage chez un médecin généraliste en libéral. C'était un patient que je voyais tous les mois car il avait des pathologies assez lourdes. C'était dans le Loir-et-Cher et la première fois que je suis entré chez lui j'ai découvert de nombreux objets avec des symboles Bretons, le patient était d’ailleurs habillé avec un t-shirt sur lequel il y avait un Triskell.

Après avoir fait ma consultation en repartant je lui ai dit "Kenavo !", le patient a été surpris et m'a demandé comment je connaissais ce mot. Je lui ai donc dit que
j'étais Breton et que je venais d'arriver dans la région. Il m'a alors dit qu'il adorait la Bretagne, ce que j'avais largement remarqué en voyant sa décoration intérieure.

Toutes les fois suivantes où je suis allé le voir il m'avait préparé un gâteau car il était cuisinier de formation. Il posait plein de question sur ma région. On passait plus de temps à parler de la Bretagne que de son état de santé !

Quel.s conseil.s donnerais-tu aux étudiant.e.s intéressé.e.s pour devenir Médecin ?

Je dirais que ce sont des études difficiles car on a beaucoup de choses à apprendre en peu de temps, et que l'investissement personnel est important à l'hôpital si on veut être un bon médecin mais que cela vaut largement le coup et qu'il faut donc s'accrocher.


Merci pour ta participation et ton engagement Paul, bon courage pour la suite de ton internat !